Ski de fond
Harvey revoit ses objectifs
La Presse
Déception
Sur papier, Harvey a connu le meilleur Tour de ski de sa carrière. En réalité, cette 14 place au classement final est une véritable déception. « Je visais le ou peut-être mieux, a souligné l’athlète de 27 ans, privé de podium pour la première fois depuis le Tour 2010-2011. J’ai eu une ou deux journées vraiment mauvaises physiquement, et on a eu une ou deux journées aussi où les skis ne marchaient pas vraiment. Finalement, il n’y a que trois courses [sur huit] où tout était vraiment bien. »
Problèmes techniques
Douloureux rappel du cauchemar des Jeux olympiques de Sotchi, le Tour de ski a exposé la fragilité de la petite équipe technique canadienne. Le problème a été particulièrement criant lors de la cinquième étape à Oberstdorf, un 15 km classique où Harvey et ses skis n’ont jamais été dans le coup. Les nombreux changements survenus durant l’entre-saison ont ébranlé un équilibre déjà précaire, estime le fondeur. Le Suédois Micke Book, qui s’occupait de la cire d’adhérence depuis plusieurs années, a été remercié. L’Italien Fabio Ghasifi, qui devait le remplacer dans ce rôle critique, a accepté un emploi chez un fabricant. L’ex-entraîneur-chef norvégien Torn-Arne Hetland jouait aussi un rôle-clé dans le testage. « Trois gars d’expérience, trois Européens, qui partent d’un coup, ça laisse plus de traces qu’on pensait, évalue Harvey. On paye un peu au niveau de la régularité de l’équipement. » Pour couronner le tout, le technicien-chef Yves Bilodeau s’est fracturé une jambe en décembre. Le farteur d’expérience est donc confiné à la salle de fartage et ne peut plus mesurer la glisse sur les pistes.
Problèmes physiques
Si Harvey a exprimé son mécontentement au sujet des skis à Oberstdorf, il a pris tout le blâme après sa déconvenue le surlendemain à Toblach, où il a échoué à la 37 place. « Ça arrive plus souvent [que les farteurs] nous donnent de bons skis et que nous ne livrons pas la marchandise que le contraire. » Il fondait pourtant de grands espoirs sur ce 10 km libre, épreuve où il était monté sur le podium en début de saison en Finlande. « Au Tour de ski, personne n’est au top pendant 10 jours, même pas [le gagnant] Martin Johnsrud Sundby. C’est la journée où je n’étais pas là physiquement. Je ne sais pas pourquoi. Peut-être la journée de repos la veille. On s’entraîne quand même, mais c’est comme ça aussi en cyclisme : le lendemain, tu vois souvent de grosses explosions. Peut-être que le corps pense que tu lui donnes un vrai repos et qu’il se met en mode veilleuse. »
Manque de puissance
En feuilletant ses notes de course, le quadruple médaillé en championnats du monde a relevé une constante depuis le début de la saison : manque de puissance et de force. Il l’a constaté lors des deux sprints au Tour de ski, mais aussi sur les séquences de course de distance où il avait l’habitude de se démarquer, sur le plat et en double poussée. Il attribue ce déficit aux deux mois où il n’a pu faire de musculation et de travail en intensité après ses opérations aux artères iliaques. Après une longue rencontre avec son entraîneur Louis Bouchard, hier, il a convenu d’ajouter quelques séances à intensité maximale à sa préparation dans les prochaines semaines. « Il faut que je remette cet outil-là dans mon attirail. » En revanche, il ne s’est jamais aussi bien senti dans les montées, comme celle bien particulière de l’Alpe Cermis, où il a fait jeu égal avec des spécialistes comme Legkov et Manificat.
« Des fois, tu te concentres trop sur tes faiblesses, et tes forces en souffrent un peu. On dirait que c’est ce qui s’est passé cette année. »
Changement de cap
Sans être démoralisé par son échec au Tour de ski, Harvey doit revoir ses objectifs pour le reste de la saison. Non seulement le Norvégien Sundby a déjà presque gagné le Globe de cristal, mais le Canadien n’a plus espoir de finir parmi les trois premiers du classement cumulatif de la Coupe du monde. « Je recentre mes objectifs uniquement sur le Tour du Canada (du 1 au 12 mars) », a annoncé celui qui occupe désormais le 13 rang. Le plan d’entraînement sera ajusté en conséquence, en espérant accrocher quelques bons résultats ici et là. Comme prévu, Harvey ratera la Coupe du monde en Slovénie cette fin de semaine et retrouvera le circuit en République tchèque le 23 janvier. En attendant, il chaussera des skis alpins aujourd’hui pour une journée de poudreuse dans les Alpes autrichiennes, où la qualité de la glisse n’aura aucune importance.